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par Tristan de HGuitare

La fender telecaster

MYTHIQUE, VOUS AVEZ DIT MYTHIQUE ?

Créée en 1949 la Telecaster est le premier coup de maître du californien Leo Fender. La première guitare électrifiée sans caisse de résonance ! 

Un type de guitare qui sera désignée sous le terme « Solid Body ». La Fender Telecaster n’est d’abord équipée que d’un seul micro (simple bobinage, fixé au chevalet) et ne s’appelle pas encore « Telecaster » mais « Esquire ». Après quelques améliorations, et notamment l’ajout d’un micro-manche, elle devient brièvement la « Broadcaster ». 

Mais inconsciemment ou non, Léo Fender a piqué ce nom à une série de batterie de son concurrent Gretsch (déjà fabriquant d’instruments de musique depuis 67 ans à l’époque !). Alors en fan de technologie qu’il est, et pour éviter un procès onéreux, il rend hommage à un prodige de l’électronique qui vient de faire son apparition : la télévision. 


LA GUITARE A ENFIN TROUVÉ LE NOM QUI ENTRERA DANS LA LÉGENDE : LA TELE-CASTER !

« Petite Parenthèse » : Durant la période de flottement où son nouveau prototype ne portait pas de nom, quelques exemplaires sont sortis avec simplement le logo « Fender » ; cette courte série a été baptisée plus tard : « No-Caster », officieusement.   

A la base, le « père Fender » né Clarence Leonidas Fender en 1909, a un métier et une passion : le premier est la comptabilité et la seconde l’électronique. 

Après avoir perdu son job de comptable à la California Highway Dpt., âgé de trente ans, Leo Fender fonde sa propre entreprise de disquaire/réparateur de radio en 1939.  

Puis petit à petit, à force de bricoler les systèmes d’amplification, il se met à fabriquer ses propres amplis. C’est quelqu’un qui a non seulement des idées innovantes mais également le sens des affaires. Au contact de ses amis guitaristes (lui-même ne joue pas de guitare), il s’intéresse de près à ce qui pourrait améliorer les instruments, tant au niveau du son qu’au niveau de l’ergonomie. 

Il s’associe, en 1944 à Clayton Kauffman alias « Doc », qu’il rencontre durant la guerre. Doc Kauffman joue du Lap-Steel Guitar et ensemble ils conçoivent un modèle inspiré par celui de Rickenbacker surnommé la Frying Pan « Poêle à frire ». 

- La Frying Pan -


Partant du principe de créer une guitare maniable et moins sujette au larsen, il décide que la Telecaster sera plate, quelque chose entre la « Poêle à frire » et les modèles « Thinline/Demi-caisse » fabriqués par Gibson. 

Le début des années 1950 est donc marqué par l’apparition de la Fender Telecaster qui, même si elle subira de légères modifications dans les premières années, se fera une place parmi les styles les plus populaires au gré des modes.  

En tant qu’amateur de musique Country, Léo Fender destine tout d’abord sa Telecaster à ce genre de musique. Les musiciens de Country apprécient d’ailleurs particulièrement sa sonorité qui se marie à merveille avec le registre vocal. 

Cependant, la Telecaster sera par la suite utilisée dans de nombreux autres styles, du Blues au Rock en passant par la Soul, la Funk ou le Reggae.  


ILS ONT JOUÉ (OU JOUENT ENCORE !) SUR LA FENDER TELECASTER

Qu’elle soit leur guitare de prédilection ou une alternative à leur son habituel, de nombreux guitaristes excellents et/ou célèbres ont tâté de la Telecaster. 

Pourtant fidèle à la Stratocaster, David Gilmour utilisera un modèle de 1952 à plusieurs reprises en studio (sur les albums Animals ou The wall) et quelquefois en live. George Harrison en utilisera une sur l’album Let It Be. Steve Howe de Yes utilise sa version customisée tout comme Keith Richard des Rolling Stones, ils ont remplacé les micros. 

                                                                                                                    KEITH RICHARDS et sa Tele’ Customisée


Durant les années 1960, Jimmy Page, Eric Clapton et Jeff Beck joueront succesivement sur la même, appartenant aux Yardbirds.   

Evidemment, Jimmy Page avait quand même les moyens de se payer son propre modèle qu’il utilisait parfois sur scène avec Led Zeppelin, pour changer de sa Gibson SG.


Bob Dylan arborera également une Telecaster lors de sa tournée de 1966.

Ritchie Kotzen (Ex Poison et Mr Big) possède, quant à lui, un modèle Telecaster signature chez Fender. Ritchie Kotzen et son modèle « signature » équipé d’un chevalet en laiton, d’un micro DiMarzio « Twang King » et d’un autre DiMarzio « Chopper T ». Fabriquée au Japon, on la trouvait uniquement dans ce pays durant ses premières années de commercialisation. On peut désormais la trouver (presque) partout. 


Tom Morello des Rage Against The Machine l’utilise fréquemment (et notamment dans le célèbre « Killing in the name of »). Il en tire un son des plus tranchant ! 

The Edge de U2 parvient, à l’aide de pédales, à en sortir des sonorités disons… innatendues. 


Et puis en vrac : Mike Oldfield, Noel Gallagher d’Oasis, Roy Buchanan, Francis Rossi de Status Quo, Bruce Springsteen dont elle est la guitare emblématique, Syd Barret, Jeff Buckley, Mike Bloomfield, le bluesman Albert Collins, Franck Black des Pixies, Joe Strummer des Clash, Andy Summers de The Police, Pete Townshend des Who, Prince, Joe Walsh dans les Eagles, Graham Coxon du groupe Blur… Pour n’en citer qu’une partie !  


FABRICATION & LUTHERIE DE LA FENDER TELECASTER

Dès sa première année de sortie, il se vendra plus de 4000 exemplaires de la Telecaster aux USA. L’atelier de Fender fonctionne déjà comme une petite usine, avec des postes de travail alignés les uns derrière les autres et chaque ouvrier s’afférant à sa tâche particulière. 

Dotés d’un esprit pratique, Léo Fender décide de visser le manche au corps de la guitare plutôt que de le coller. Ceci par souci d’économie et de temps de fabrication. 

Et ça comporte également l’avantage de pouvoir changer le manche d’une gratte défectueuse en un tournemain ! (et en un tournevis !) 

Le corps de la Telecaster est constitué d’une pièce de bois en Frêne ou en Aulnes, le manche est en érable, et encore une fois par souci de rentabilité des postes de travail, les premiers modèles ne possèdent pas de touche rapportée. Ce n’est qu’à partir de 1959 que la firme adoptera ce procédé en utilisant du palissandre ou une nouvelle (fine) couche d’érable. Le manche est pourvu de 21 frettes, donc 22 cases. 

NB : A la fin des années soixante, Fender va également expérimenter d’autres essences de bois pour la Telecaster, comme le palissandre ou l’ébène.

Jusque dans les seventies, la Telecaster est équipée de deux micros « simple bobinage » (Single-coils). 

Comme vous l’aurez compris à partir des années 1970, Fender va proposer une version dotée d’un Humbucker côté manche et garder le simple, fixé au chevalet (dépourvu de vibrato). 

Ha ! Oui ! ça aussi, c’est une des ses particularités : le chevalet-fixe est constitué d’une plaque métallique rectangulaire sur laquelle sont vissés les 3 pontets accueillant chacun deux cordes. Le micro-simple est incrusté dans la plaque. On identifie aisément la Fender Telecaster grâce à cette plaque mais également par sa tête filiforme en arrondis caractéristiques.

 
Trois positions pour le sélecteur de micro : 

1>Micro-manche ; 2> Mix des deux micros ; 3> Micro-chevalet 

et deux potards : un pour le volume et un pour la tonalité. Somme toute assez logique et même classique me direz-vous ?! Oui mais… si la date de fabrication de votre Telecaster est antérieure à 1967, les combinaisons tiennent d’un petit casse-tête. Amusons-nous quelques secondes !   

Pour les modèles produits durant les deux premières années, la logique du sélecteur fonctionnait ainsi :  

Micro-manche (MAIS avec un coupe-haut pour les rythmiques) ; 
TOUJOURS le micro-manche mais cette fois, sans coupe-haut. 
Un mix des deux micros, mais on règle le mélange sur l’un des potards. 
Le second potard servant évidemment au volume général. 

Bon ok, facile ! 


Puis deux ans plus tard, le schéma du câblage des micros est modifié et on obtient :

1 - Micro-manche (MAIS avec un coupe-haut pour les rythmiques) ; donc pareil !
2 - ENCORE le micro-manche mais cette fois on peut régler la tonalité avec le potard du bas. Pas super utile vu que ça offre peut de variante avec la 1ère position…
3 - Un mix des deux micros, mais on règle le mélange sur l’un des potards.

Donc si j’ai bien compris, il n’y a pas de réglage de tonalité sur le micro-manche mais avec le « cut » dans les aigus, c’est comme si j’avais laissé la tona à zéro, chose que je peux faire aussi sur la seconde position, finalement… 

Hmm ! Donc ça n’a pas grand intérêt. Le schéma adopté à partir de 1967 paraît plus judicieux, sauf qu’on perd cette fois la possibilité d’équilibrer le mélange entre les deux micros. 

Mais quand, diantre ! ajouteront-ils un troisième potard ?! Patience ! Bientôt Fender va sortir des variantes de la Telecaster avec plein de petits boutons !  


LES DIFFÉRENTES DÉCLINAISONS DE TELECASTER

En premier lieu on citera la « Telecaster 50 » puisque c’est le nom de série qu’on donne aujourd’hui au modèle qui reste fidèle à ceux sortis dans les années 50. 

On peut donc la considérer comme LA Telecaster de base d’où vont partir toutes ses variantes qu’il me sera impossible de répertorier ici de manière exhaustive, mais voyons tout de même ses principales déclinaisons. 


En 1969 Fender sort des modèles Telecaster Thinline (ou demie-caisse si vous préférez), avec une ouïe permettant une diffusion plus soutenue du son. Toujours équipée de 2 micros-simples ou 2 Humbuckers comme sur l’exemple ci-dessous. 


En 1972 arrive un modèle plus adapté au besoin du son saturé des rockeurs : la Telecaster Deluxe. Elle est pourvue de 2 humbuckers, 4 potards (Ha ! chic des nouveaux boutons !!!),  de pontets individuels pour chaque corde et sa tête fine est élargie pour imiter celle de sa consoeur Stratocaster sortie 18 ans plus tôt (voir l’article sur la Stratocaster). 


La même année Fender offre une variante de la Deluxe nommée Telecaster 72 Custom. Elle possède les mêmes caractéristiques que la précédente mais avec un micro-simple au chevalet.    

Les années 80 voient Fender en perte de vitesse et en passe de devenir une marque « ringarde ». Pour se renouveler et répondre au besoin des guitaristes « modernes », la firme lance le modèle Contemporary. Mais le succès de ce prototype équipées de deux micros-simples et un double et dépourvu de pickguard ne sera pas au rendez-vous.  


Idem pour la Telecaster Heavy Metal qui sort dans la même période. Avec sa tête affinée, son système de bloc cordes genre « Floyd Rose » et ses micros boostés, il ne subsiste plus que le nom de Telecaster, même si la guitare est paraît-il très bonne. 


Un autre relooking va donner la Telecaster Elite. Son aspect bois, son pickguard remanié, ses accastillages dorés et son nouveau type de micros lui confèrent un look assez sobre qui peut séduire les Jazzmen. 


Entre 1990 et 1995 un modèle peu apprécié des aficionados sera fabriqué en série limitée. La Telecaster Plus. Ce qu’on lui reproche ce sont ses micros Lace Sensor (trop moderne pour les puristes). Le double-chevalet est splittable. Et le corps est en peuplier. On a donc ici le look de la Telecaster mais pas le son ! 

Cela dit, pourquoi pas ? Si on cherche autre chose que le son « Tele » typique. 


Au Mexique, Fender fait fabriquer la Telecaster Nashville Deluxe qui est, quant à elle, munie d’un troisième micro (central). Mais son look général reste sensiblement inchangé.   

Citons aussi pêle-mêle : La Telecaster Esquire qui n’est autre que le tout premier modèle avec un seul micro (souvenez-vous, c’était son nom avant de devenir Telecaster), la Telecaster Cabronita et la Baja fabriquées au Mexique, la Telecaster Artisan P90 équipée, comme son nom l’indique, d’un micro-manche P90…  


LE(S) SON(S) ET LA JOUABILITÉ DE LA FENDER TELECASTER

Même si certains modèles proposent des options plus ou moins utiles, le son de la Telecaster reste très caractéristique et ses multiples déclinaisons n’apportent que très peu de différences de timbre (à part la « Telecaster Plus » citée plus haut). 


DU DIAMANT POLI SOUS LES DOIGTS, DU « TWANG » DANS LES MIX !

On pourrait définir le son de la Telecaster comme « nasillard » mais assez « moelleux » également. 

La caisse pleine et le manche vissé apportent peu de sustain. Néanmoins, en poussant le gain et le volume de son ampli on parvient à la faire crier. Et je n’emploie pas ce terme par hasard car, effectivement, le son de la Fender Telecaster peut vite devenir criard s’il est mal géré !     

Une de ses particularités est ce que les amateurs de Telecaster nomme le « twang », c’est à dire toute la somme de ce que je viens d’évoquer, avec cette attaque bien tranchée sur les rythmiques. 

Comme l'affirment les chanteurs de Country de la première heure : son spectre de fréquences s’allie très bien avec la voix. De plus, elle trouve facilement sa place au sein d’un mixage. Sa couleur particulière lui confère une sonorité bien spécifique qu’on obtiendra à grand peine (voire jamais) avec une autre guitare.  

Ses points forts :

- Une jouabilité agréable
- Un son unique 
- Fiabilité et longévité (bien soignée, elle aura même tendance à se bonifier avec le temps). 

Ses points faibles :

- Son manque de polyvalence. 
- Seulement trois pontets pour six cordes, donc pas de réglage individuel de chaque corde au niveau de l’action et du diapason mais un jeu d’équilibre et de compromis pour trouver le bon réglage. Cela dit, comme nous l’avons vu plus haut, certaines gammes de Telecaster sont équipées de pontets individuels. 
- Pas de vibrato, mais est-ce un point faible pour vous ? (Et encore une fois : certains modèles en sont équipés mais ne gardent pas forcément les -caractéristiques de la version originelle). 


QUEL EST LE PRIX D’UNE TELECASTER ? 

Selon les séries et équipements, le prix fait des montagnes russes :  

Ça commence avec la série «  Player  » aux environs de 650 euros et ça monte progressivement entre 1500 et 3000 euros selon les options. Les modèles les plus chers, comme par exemple, la Fender Jimmy Page Mirror, peuvent se vendre près de 23000 euros. Et si vous l’achetez d’occasion, selon son état et son année de production vous pouvez la payer parfois plus chère qu’une neuve ; quand je vous disais qu’elle se bonifie avec le temps ! 

De nombreuses marques à tout prix, se sont lancées dans la réplique de cette guitare historique :  

La marque Fazley propose un prix dérisoire pour son modèle FTL218NT, à partir de 75euros… là, on est en droit de se demander sur quoi on va tomber, même si le look y est ! 


G&L, avec ses séries Classic et Tribute ASAT, propose des copies de la Telecaster, sous ses multiples déclinaisons aux alentours de 600 euros. 

Pour moins de 400 euros, on peut aussi s’offrir la Vintage V52 Reissued.

Juste pour la frime on déboursera 69 euros pour une Rockson TL. Encore une fois, le look typique de la Telecaster est là, mais qu’en est-il du son ? 


Et pour s’approcher de la sensation du vrai à moindre frais, on pourra opter pour la Squier (Fender) Affinity Tele qui ne coûte guère plus de 200 euros mais qui, comme chacun sait, est fabriquée dans les usines Fender (au Japon, néanmoins !).

La Fender Telecaster est, avec la fameuse Stratocaster (voir l’article sur la Stratocaster), une des guitares les plus iconiques de l’histoire de la guitare électrique. 

C’est finalement une guitare assez sobre qui délivre un son « organique » qu’il est très plaisant de générer sous ses doigts. A vous de voir si le prix en vaut la chandelle ! 

Rédacteur : Chris Sterpi